Enfants

Lune rousse (3/3)

Chapitre trois

Le temps passait avec lenteur et angoisse pour les cinq enfants. Encore et encore, ils grimpaient le flanc de la montagne, exploraient les forêts et les pâturages ; inlassablement, ils appelaient Coco, mais seul l’écho leur répondait. Liliane s’essoufflait et toussait de plus en plus. Inquiet, son frère lui posa la main sur l’épaule.

« Liliane, tu dois t’arrêter et te reposer, maintenant. »

La jeune fille secoua la tête.

« Faut… retrouver… Coco… haleta-t-elle.

– Tu m’as déjà dit ça cent fois. Maintenant ça suffit. Tu dois aussi respecter tes limites, affirma-t-il avec autorité. Si tu continues, tu auras une grosse crise d’asthme et on sera bien avancé ! Il y a une grande pierre ici, poursuivit-il. Assieds-toi et prend ton inhalateur avant que ce soit la catastrophe. »

Il la força à s’asseoir, fouilla le sac de sa sœur et lui tendit son médicament. Liliane se laissa faire avec reconnaissance. Elle ne s’était pas rendu compte à quel point elle respirait mal.

« Dites, grogna Xavier, ça a servi à quoi vos prières ? Nous n’avons toujours pas retrouvé Coco et maintenant nous sommes tous arrêtés !

– Tu manques singulièrement de compassion, lui reprocha Hugo. Tu peux continuer tout seul, si tu veux !

– Vous pouvez poursuivre les recherches, proposa Patrice. Moi je reste ici avec Liliane. 

– Tu es sûr que ça ira ? s’inquiéta Salomé.

– Ne vous en faites pas ! Soyez prudents ! »

Liliane les regarda partir avec regret. Elle aurait tant aimé se joindre à eux et ne pas rester en arrière à cause de son asthme. Patrice les suivit du regard avec soulagement. Enfin, il avait réussi à convaincre Liliane de se reposer !

« Il fait beau, remarqua platement Patrice.

– Oui… soupira Liliane.

– Eh bien, profitons un peu du soleil ! »

Liliane sourit à son grand frère et s’installa à côté de lui sur la pierre, heureuse de sa présence. Petit à petit, sa respiration redevenait normale et elle commença à regarder autour d’elle. Tout était silencieux, les oiseaux s’étaient tus. Tout en haut, dans le ciel, planaient des rapaces, petits points noirs sur fond bleuté. Plus loin encore, on voyait les longs panaches blancs laissés par les avions, tandis que tout à côté d’elle les branches des sapins pendaient mollement. Tout était calme, comme endormi. Soudain, Liliane se redressa.

« Patrice, j’entends un bruit…

– Il y a le ruisseau qui ne passe pas très loin.

– Non, ce n’est pas ça. Ça me rappelle quelque chose, mais je ne sais pas quoi… »

Patrice tendit l’oreille et se concentra.

« Je crois que je l’ai aussi entendu » murmura-t-il. 

Ils se regardèrent sans oser préciser le fond de leur pensée. Ce bruit étrange, n’était-ce pas des sanglots ?

« Allons voir ce que c’est » décida Patrice.

Liliane hocha la tête et se leva.

« Je crois que ça vient de là, dit-elle en désignant un amoncellement de rochers.

– J’ai la même impression » approuva son frère.

Ils quittèrent le chemin et s’enfoncèrent entre les blocs de pierre, escaladant les uns, contournant les autres. Tout à leurs recherches, ils ne remarquèrent pas l’atmosphère se voiler.

« Ce sont bien des pleurs, confirma Patrice dans un murmure.

Enfin, au détour d’un rocher, ils virent un petit enfant assis par terre. Il portait un pantalon bleu et un polo orange. C’était lui ; enfin, ils l’avaient retrouvé ! La gorge nouée, Liliane l’appela :

« Coco ! »

L’enfant sursauta et leva la tête, portant sur Liliane un regard baigné de larmes.

« Tu t’es perdu ? Tu t’es fait mal ? » demanda-t-elle d’une voix douce.

Pour toute réponse, Coco hurla plus fort.

« Explique-moi ce qui ne va pas… insista-t-elle.

– Attends, intervint Patrice, je vais essayer d’appeler les autres. »

Il mit deux doigts entre ses lèvres et émit un sifflement strident. Coco le regarda avec surprise et en oublia de pleurer.

« Comment tu fais ça ? l’interrogea-t-il.

– Petit coquin, le gronda Patrice, ce n’est pas le moment d’apprendre à siffler, mais de rentrer chez toi !

– Patrice ! » Une certaine angoisse pointait dans la voix de Liliane. « Regarde ! »

Patrice leva les yeux : les montagnes avaient disparu, les sapins s’étaient évaporés, les rochers estompés. Tout le paysage s’était comme rapetissé, noyé dans une masse grise et trouble.

 « Le brouillard ! 

– Je n’aime pas ça, murmura Liliane en frissonnant.

– Moi non plus. Il faut nous dépêcher de rentrer.

– Mais par où ? »

Patrice se tourna et se retourna.

« Je crois que nous sommes venus par là.

– J’aimerais en être sûre, articula Liliane.

– On ne va pas rester plantés là sans rien faire ?!

– Tu pourrais siffler jusqu’à ce que les autres nous entendent.

– Ils sont peut-être déjà loin d’ici ! Et le brouillard étouffe les sons.

– Je suis certaine qu’ils ont rebroussé chemin quand le brouillard est tombé, argumenta Liliane. Ils finiront bien par arriver à la pierre où ils nous ont laissés. Tu crois que c’est loin d’ici ?

– Non, reconnut Patrice, à vol d’oiseau, nous ne devons pas en être très loin.

– Alors ils devraient entendre…

– C’est une chance à tenter, tu as raison. »

Tandis que Patrice sifflait à pleins poumons toutes les dix secondes, Liliane prit Coco sur ses genoux et l’entoura de ses bras pour le réchauffer un peu.

« Est-ce que Xavier va venir ? demanda le garçon d’une petite voix.

– Je pense que oui, le rassura Liliane. Mon frère siffle très fort, tu ne trouves pas ? Xavier entendra sûrement et il viendra nous aider.

Le temps passa lentement, entrecoupé des sifflements de Patrice. Enfin, il leur sembla voir une ombre grise s’approcher et une voix les héler.

« Patrice ! s’écria Liliane, il y a quelqu’un qui vient !

– J’ai aussi vu bouger, confirma Patrice.

– Ohé ! cria Liliane.

– On est là ! s’égosilla Patrice.

– Hugo !!! »

Tous deux coururent se jeter dans les bras de leur cousin.

« Mais qu’est-ce que tu fais ici dans cette tenue ? s’étonna Patrice. Ma parole, on dirait que tu es sur une plage en plein soleil ! Tu ne trouves pas qu’il fait froid ? 

– Où sont ton t-shirt, ton pantalon et tes chaussures ? » poursuivit Liliane.

Hugo rit et frotta ses bras nus pour se réchauffer.

« J’ai joué au petit poucet.

– Quoi ?

– J’ai semé mes affaires pour retrouver mon chemin. A quoi cela aurait-il servi si j’étais venu jusqu’à vous sans être capable de rebrousser chemin ?

– A rien, c’est vrai, concéda Patrice.

– Nous ne savons pas siffler aussi fort que toi, Patrice, et nos voix ne portent pas dans cette purée de pois. Mais qu’est-ce que vous êtes venus faire par ici ?

– Regarde qui nous avons trouvé ! » s’exclama fièrement Liliane en désignant le garçonnet.

Hugo se pencha pour voir qui se cachait derrière Patrice.

« Coco ! s’écria-t-il surpris. C’est merveilleux ! Xavier va être drôlement content de te revoir ! »

Tous quatre se mirent sans tarder en route. Hugo ouvrait la marche et Patrice portait Coco sur son dos.

« Vous voyez, j’ai laissé mon pantalon sur le chemin, comme une balise. Je vais vite le remettre. Et là-bas, il y a une de mes chaussures. Vous l’avez vue ?

– C’est ingénieux, admira Patrice.

– Heureusement que tu avais assez d’objets à semer, observa Liliane.

– Il me restait encore les chaussettes, s’amusa Hugo en enfilant sa deuxième chaussure. Une chance que vous ne soyez pas allés beaucoup plus loin ! »

Hugo ramassa encore son t-shirt, ses jumelles, son étui et son chapeau.

« Eh ! mon sac-à-dos ! s’esclaffa Patrice.

– Il est vide, précisa Hugo un sourire en coin, mais on pourra bientôt le remplir ! »

Cheminant lentement dans le brouillard, à travers le chaos de rochers, les enfants suivaient le chemin tracé par tous les objets qu’Hugo avait déposés sur les cailloux. Liliane les ramassait au fur et à mesure. Lorsque le sac-à-dos fut plein, ils étaient enfin en vue du gros rocher qu’ils avaient quitté quelque temps plus tôt.

« Ohé ! Salomé ! On est tous là ! s’époumona Hugo.

– On va retrouver ton frère » précisa-t-il à l’adresse de Coco.

Celui-ci s’agita soudain.

« Xavier ! Xavier ! hurla le garçonnet de sa voix perçante.

– Coco !!! »

Fou de joie, Xavier serra Coco dans ses bras.

« Qu’est-ce que tu faisais-là ? demanda-t-il enfin.

– Je suis tombé…

– Comment ?

– J’ai grimpé sur un rocher et je suis tombé.

– Mais qu’est-ce que tu faisais sur ce rocher ?

– Je me suis perdu.

– Mais comment tu as fait pour te perdre ici ?

– Ben…

– Nous t’avons beaucoup appelé. Tu n’as rien entendu ? »

Coco baissa piteusement la tête.

« Pourquoi n’as-tu pas répondu ? Et pourquoi es-tu parti si loin sans rien dire ?

– J’avais peur…

– De qui, de quoi ?

– De papa.

– Et pourquoi ? s’étonna Xavier.

– Il a crié tellement fort ! »

Xavier jeta un regard courroucé sur Hugo.

« Mais… Tu as cru qu’il était fâché contre toi ? »

Coco hocha doucement la tête.

« Mais pourquoi serait-il fâché contre toi ?

– J’ai pas fait exprès ! se défendit Coco.

– Qu’est-ce que tu n’as pas fait exprès ?

– La terre, c’était pour jouer » renifla-t-il.

Xavier comprit soudain ce qui s’était passé.

« C’est toi qui as mis la terre dans la pâte à pain ?

– Quelle pâte ?

– Où as-tu mis de la terre ?

– Dans la machine.

– Il y avait de la pâte à pain dans la machine ! se fâcha Xavier. Qu’est-ce qui t’as pris de mettre de la terre là-dedans ! 

– Je m’ennuyais ! sanglota Coco. Tu devais jouer avec moi et tu n’étais pas là ! »

Xavier rougit brusquement. Finalement, c’était encore lui, Xavier, le responsable de ce lamentable incident. S’il avait veillé sur son petit frère, comme ses parents le lui avaient demandé, rien ne serait arrivé. Il regarda Hugo du coin de l’œil.

« Je suis désolé, le Rouillé. J’étais tellement sûr que c’était toi… Désolé…

– Je te pardonne, assura Hugo, heureux d’être enfin innocenté. Mais dis bien à ton père que je n’y suis pour rien. 

– Je le ferai, promit Xavier. Et merci d’avoir aidé à chercher Coco.

– Avec plaisir ! Mais remercie aussi Dieu.

– Pourquoi ça ?

– Il a répondu à nos prières et a fait que nous retrouvions Coco.

– Ouais, bon, enfin… protesta Xavier pas convaincu.

– Si Liliane n’avait pas dû s’arrêter ici à cause de son asthme, explicita Hugo, personne n’aurait entendu pleurer ton frère.

– Ah ! Je n’y avais pas pensé… murmura-t-il. Tu as peut-être raison.

– Certainement ! » sourit Hugo. Puis il poursuivit : « Tu viens aussi à l’observatoire demain ?

– Oui, c’est prévu de longue date.

– Alors, à demain !

– Oui, à bientôt ! »

Le lendemain soir, Hugo, Salomé, Patrice et Liliane reprirent le chemin de la station du funiculaire. Heureusement, il faisait à nouveau beau. Aujourd’hui, les parents des jumeaux les accompagnaient. Une grande partie du village convergeait dans la même direction ; et on venait même de bien plus loin pour assister à ce fameux rendez-vous fixé par le ciel. Ils gravirent les marches en béton, poussèrent le tourniquet et grimpèrent dans l’une des voitures bleues. Les places assises étaient déjà prises, mais peu importait. Les enfants étaient si excités qu’ils étaient incapables de rester en place. Enfin, le convoi s’ébranla, quitta le quai et se mit à gravir régulièrement la pente de la montagne.  Bientôt, ils laissèrent les maisons derrière eux et traversèrent la forêt qui surplombait le village. A mi-parcours, ils croisèrent le véhicule descendant. Le sommet n’était plus éloigné, maintenant.

« Ouf ! de l’air frais ! se réjouit Salomé en sortant de la station amont.

Liliane regarda autour d’elle. Au près et au loin s’étendaient des sommets dont certains étaient encore enneigés.

« C’est lui, le Cervin ? demanda-t-elle à sa cousine.

– Oui, et là-bas, c’est la Dent Blanche.

– Elle porte bien son nom, remarqua-t-elle avec un sourire.

– C’est vrai. »

Liliane frissonna et enfila sa veste. L’air fraichissait et au-dessus d’elle s’allumaient les premières étoiles.

« Là-bas, vous pouvez voir l’observatoire avec son dôme, expliqua Hugo en pointant du doigt un bâtiment aux formes étranges.

– Il y a un gros télescope ? s’informa Patrice.

– Oui, c’est vraiment bien équipé.

– Et on va devoir le partager avec tout ce monde ? s’inquiéta-t-il.

– Non, les places sont comptées, intervint le papa. Heureusement que j’ai réservé !

– Alors, pourquoi tant de gens viennent-ils jusqu’ici ?

– Parce qu’ici, l’atmosphère est particulièrement pure et permet une excellente observation. Il y a en a plusieurs qui ont leurs propres petits télescopes et certains feront de magnifiques photos. Et puis, la lune sera très basse sur l’horizon ce soir, on la verra bien mieux depuis ici. »

« Regardez ! s’exclama quelqu’un, elle se lève ! »

Tous examinèrent avec attention l’endroit désigné. Mais oui, là-bas, on commençait à voir paraître une lueur orangée. Petit à petit, la lune se montra entière, d’un roux foncé surprenant. A côté d’elle scintillait la planète Mars, rouge elle aussi. C’était un spectacle d’autant plus émouvant qu’il était rare. Chacun savait qu’il ne se reproduirait pas avant de nombreuses années. Il leur semblait que c’était un privilège que de contempler côte à côte ces deux astres qui semblaient se saluer.

« Savez-vous combien d’étoiles vous pouvez voir dans le ciel ? chuchota Hugo à l’adresse de ses cousins.

– Beaucoup, estima Patrice sans trop prendre de risques.

– A l’œil nu environ 3000, révéla-t-il. Si les conditions sont bonnes. Mais avec le télescope, c’est autre chose ! »

Patrice n’eut pas le temps de répondre. Un garçon de leur âge venait de surgir dans leur groupe.

« Eh ! Salut le Rouillé !

– Salut Xavier ! répondit poliment Hugo. Tu es bien rentré hier après-midi ?

– Oui, merci. Papa était fâché que je n’aie pas surveillé Coco. Heureusement qu’il m’a quand même laissé venir.

– Ça aurait été dommage de rater ça, reconnut Hugo.

– C’est grâce à toi que j’ai pu venir, reconnut Xavier. Seul, je n’aurais pas retrouvé mon petit frère. Nous aurions dû appeler la police et à tous les coups mon père m’aurait privé de sortie. Merci beaucoup. Je te promets de ne plus me moquer de toi, le Rouillé.

– Tu ne pourrais pas m’appeler par mon prénom ?

– Je crois que c’est au-dessus de mes capacités, prétendit Xavier. Mais console-toi ; aujourd’hui la lune est couleur de rouille et c’est elle la vedette.

– Ouais, elle est presqu’aussi rousse que moi » maugréa Hugo mi-contrarié, mi-amusé. Puis, saisissant l’occasion de changer de sujet, il expliqua :

« Je suis venu avec mes cousins. Ils vont se régaler : c’est la première fois qu’ils viennent dans un observatoire.

– Moi aussi, avoua Xavier.

– Non ?! s’écria Patrice incrédule. Tu habites ici et tu n’étais jamais venu à l’observatoire ?! »
Xavier haussa les épaules :

« C’est comme ça.

– Attendez-vous à être ébahis » prévint Hugo.

« C’était fantastique ! s’écria Patrice à la fin de la visite. On pouvait voir tous les cratères de la Lune ! Et cette couleur qu’elle avait ! C’était fabuleux !

– On a même vu les anneaux de Saturne ! se souvint Liliane.

– Et les galaxies lointaines ! ajouta Salomé.

– Et toutes ces étoiles ! enchaîna Xavier enthousiaste, le ciel en était presque blanc !

– Il y en a des milliards, leur rappela Hugo.

– Et dire que Dieu les compte et leur donne à chacune un nom[1]… s’émerveilla la maman des jumeaux.

– L’univers est tellement grand ! s’extasia Salomé. Je m’étonne que Dieu s’intéresse à nous.

– Cela m’émerveille aussi d’y penser, sourit le papa. Et Dieu ne connaît pas seulement chacune des étoiles, mais aussi chacun de nous !

– On m’a toujours dit que Dieu n’existait pas ? coupa Xavier sur un ton interrogateur.

– Cela ne l’empêche pas d’exister, sourit la maman. Un aveugle peut ne jamais voir le soleil et croire qu’il n’existe pas, cela n’empêche pas le soleil d’exister.

– Il peut sentir la chaleur du soleil sur sa peau, protesta Xavier.

– Tu peux aussi sentir la chaleur de Dieu dans ta vie. Hier, il a protégé ton frère et a fait que vous le retrouviez assez rapidement. Ce soir, il t’offre un beau spectacle avec la lune et les étoiles. Il faut le remercier pour tout cela.

– Et comment je lui dis merci ? demanda Xavier sur un ton gouailleur. Je prends une fusée ? Je toque à la porte du Ciel et je lui dis « merci pour tout » ?

– Xavier, peux-tu t’approcher du Soleil, même avec une fusée ? »

Surpris par le ton sérieux de la question, Xavier cessa de plaisanter et répondit :

« Non, c’est impossible.

– Pourquoi ?

– Le soleil est trop chaud, il brûlerait la fusée et moi avec.

– Et comment trouverais-tu la porte du Ciel, dans cet univers immense ?

– Je ne sais pas, avoua-t-il.

– Et quand atteindrais-tu la limite du ciel ?

– Jamais, reconnut-il, c’est trop loin.

– Comment pourrais-tu alors aller vers Dieu ?

– Je… Je ne sais pas, répéta-t-il.

– On ne peut pas s’approcher du Soleil qui nous brûlerait par sa chaleur ; on ne peut pas non plus s’approcher de Dieu par nous-mêmes. Nous serions brûlés par sa sainteté.

– Alors comment ? demanda Xavier.

– Grâce à Jésus-Christ. Le seul chemin qui mène à Dieu, c’est Jésus-Christ. Et la seule porte du ciel, c’est Jésus-Christ. Pour suivre ce chemin et entrer par cette porte, il faut croire que Jésus est le Fils de Dieu, qu’il est mort pour être puni à notre place et qu’il est ressuscité. Il faut aussi lui obéir. »

Xavier se tourna vers Hugo.

« Alors, toi aussi, le Rouillé, tu crois en Dieu et en Jésus ? s’enquit-il.

– Oui, confirma Hugo doucement. Je ne suis pas encore très doué, mais j’essaie de vivre pour plaire à Jésus.

– Tout cela me donne à réfléchir, grommela Xavier.

– J’en reparle volontiers avec toi.

– Sous les étoiles, cela me semble plus facile…

– Je te comprends, approuva Hugo. Le ciel raconte la gloire de Dieu… Nous sortirons un peu du village pour être loin des lumières et nous prendrons des jumelles.

– Des jumelles ? s’étonna Xavier.

– Oui, tu verras, c’est déjà drôlement chouette d’observer le ciel avec des jumelles.

– Tu l’as déjà fait souvent ? s’enquit Xavier.

– Oh oui ! répondit Hugo avec passion. Mais tu sais quoi ? A deux, ça sera encore mieux. 

– A trois ! protesta Salomé.

– A quatre ! supplia Liliane.

– A cinq ! exigea Patrice.

– A demain ! s’écria Xavier avec un large sourire.

– A demain ! »

FIN


[1] Psaume 147.4

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