Comme toujours, vous avez été très nombreux à participer à notre défi qui portait sur la description. Je trouve les petits textes particulièrement beaux, félicitations à tous ! Je me suis vraiment régalé à vous lire et j’espère que vous aurez le même plaisir en lisant cet article.
Vous trouvez ci-dessous les participations classées par ordre alphabétique. Je me suis permis d’ajouter une petite étoile sur mes trois préférées (je vous laisse deviner les critères qui m’ont guidé). Et vous, vous auriez choisi quels textes ? (répondez dans les commentaires, j’ai numéroté les textes pour plus de facilité)
Je rappelle que le défi était de montrer ce que la phrase dit (les phrases en question sont les titres) et que cette description devait nous convaincre d’un bienfait de la vie en Christ.
Bonne lecture, en attendant le nouveau défi ! Et si cela vous inspire, vous pouvez encore participer, dans les commentaires ci-dessous !
1 – Elle était attentive, par Bel13ver ⭐
Jeanne serrait un clochard dans ses bras, tandis qu’autour d’elle, on la regardait d’un œil étonné et étrange. Ô simple signe d’amour qui rappelait la vie d’avant ! Marchant dans l’ombre sale et crasse des rues de Paris, tous désespéraient de la situation de la France et du contexte sanitaire. Depuis deux ans déjà, autour d’elle, on avait cette impression étonnante d’un regard invisible et pesant sur les moindre faits et gestes ; à culpabiliser, presque, de serrer la main aux membres de sa famille et d’embrasser ses enfants ; oui, ces gestes simples il y a peu encore étaient profondément difficiles à faire en public. C’était si douloureux pour ces bonnes gens qui appréciaient tant ces effusions délicates et belles de tendresse et d’amitié. Jeanne, par sa disponibilité à aimer cet homme sale et aviné, rappelait qu’au-delà de la prudence prophylactique et de la nécessaire attention à empêcher le mal d’avancer, il demeurait important d’abaisser les barrières de notre cœur. D’ailleurs, certains souriaient en la voyant, touchés par cet instant de générosité tendre et affectueuse ; d’autres lui demandaient ce qui la poussait à faire cela. À tous, elle avait souri et montré sa croix.
2- Elle était joyeuse, par Bel13ver
Laëtitia avait regardé vers le ciel. Après le décès de son père‚ comme les regards tristes se multipliaient‚ elle avait choisi la joie du sourire. Pour la cérémonie de funérailles‚ sa famille l’avait choisie pour animer les chants au cours de l’Eucharistie. Le soleil de l’espérance se dégageait du choix de ses textes. La lumière de sa foi constante‚ belle et généreuse‚ était de celles que l’on remarque chez ces chrétiens pour qui croire‚ c’est vivre à l’exemple du Christ dans l’Évangile‚ aimer son prochain comme soi-même ; Laëtitia n’avait pas besoin de se dire chrétienne pour que l’on sût qu’elle l’était. Les regards embrumés‚ les mouchoirs qui sonnaient‚ les pleurs qui résonnaient‚ le vacarme strident des larmes‚ bref‚ l’immense tristesse de cette assemblée attiédie par des années d’opulence et de fric facile‚ contrastaient avec sa simplicité et sa musique. On chuchotait parfois qu’elle était folle‚ qu’elle devait contacter les urgences psychiatriques qui se feraient un plaisir de remettre en place son délire mystique. D’autres parlaient de communiquer avec l’Au-Delà pour retrouver le défunt en pensées‚ sans même supposer qu’il priait peut-être pour eux depuis le Paradis. À la fin‚ tandis que Laëtitia chantait la gloire de Dieu‚ il semblait que l’assistance la dévisageait d’un air inquisiteur‚ comme si tous niaient cette vie qui transfigure la mort‚ oublieux de la Résurrection. Sans juger ces airs de Vendredi saint‚ elle priait confiante pour l’âme de son défunt père. Elle en était assurée : là où il était‚ il contemplait la face de Dieu.
3 – Elle était joyeuse (Vingt-cinq décembre), par Micheline Boland
L’église était bien entretenue, construite en moellons de grès, située sur un petit tertre et décorée intérieurement par de nombreuses peintures. Ce 25 décembre, des odeurs de parfums émanaient de paroissiens qui l’entouraient. Des senteurs de muguet et de vétiver se répandaient ainsi autour d’elle. S’y ajoutaient aussi des effluves d’encens. Une foule de gens de tous âges vêtus de manteaux bien taillés en vraie ou en fausse fourrure, en laine ou portant des doudounes élégantes, se tenaient assis et semblaient fort recueillis. Le prêtre avait revêtu une tunique brillante de teinte or. Dans le chœur de l’église, la beauté de la crèche et du sapin attirait les regards. Le grand sapin aux branches fournies était garni de grosses boules multicolores et de guirlandes. Son sommet était orné d’une étoile dorée. Dans la crèche, Marie et Joseph entouraient l’Enfant Jésus déposé dans la mangeoire. Un âne, un bœuf et un ange étaient les autres personnages hauts en couleur de l’étable. Une température agréable régnait dans l’édifice. Les différentes tessitures de voix des choristes habillés de noir et de blanc se mêlaient harmonieusement. Le chef de chœur, un homme jeune et blond, portait quant à lui un smoking. La merveilleuse musique de l’orgue accompagnait le groupe. Lorsqu’ils ont tous entonné « Il est né le divin enfant », il y eut pour elle une sorte de nouvelle révélation de la foi. Des paroles trottèrent longtemps en elle après qu’elle eut quitté l’église et regagnait à pied l’appartement où elle venait d’emménager quatre semaines plus tôt : « Il veut nos cœurs, il les attend. Donnons-les lui donc promptement ».
4 – Elle était attentive, par Christ’in
Elle marchait sur un chemin de terre, tous les sens aux aguets, puis entendit le chant du coq qui annonçait le jour qui se levait. Annonçait-il un nouveau jour pour elle, un recommencement, un changement de vie ou de saison ? Au loin, l’oreille tendue, elle perçut le vrombissement d’un moteur de tracteur et s’imagina ce paysan ayant démarré son ouvrage bien avant l’aube et profitant de la fraîcheur de la nuit qui s’étire et s’évanouit, pour creuser des sillons ou retourner une terre encore meuble de la rosée du matin. Ce bruit aussi l’interpellait. Il pouvait indiquer que le Seigneur veillait sur elle, la nuit comme le jour et travaillait sans cesse en elle. Cela signifiait-il qu’elle était comme un champ de labour ou comme un vase entre les mains du potier, et qu’elle devait donc se laisser faire, se laisser modeler afin d’être utile au Royaume de Dieu, devenir un vase d’honneur ?
Arrivée à l’orée d’un bois, ses yeux naviguèrent de droite à gauche et de bas en haut. À l’affût du moindre signe, au milieu de cette nature généreuse, elle observa d’abord le ciel, puis l’horizon et les grands arbres. Elle examina la création de Dieu avant de s’attarder sur le brin d’herbe et de s’interroger sur la brièveté de sa vie. L’œil aiguisé, elle épia les fourmis dissimulées sous les cailloux ; ce peuple sans force qui prépare sa nourriture en été. Puis, relevant la tête, elle suivit des yeux un oiseau qui volait à tire d’aile, et songea qu’elle devait peut-être se mettre à l’œuvre afin d’être prête au temps voulu, ou bien alors, qu’il lui fallait demeurer dans la foi et attendre patiemment, car le Seigneur pourvoyait à ses besoins.
En direction de la grande route, elle repéra un champ de blé qui lui rappela la moisson blanche. Était-elle du nombre de ces ouvriers qui manquent à l’appel ? Devait-elle se précipiter et courir dans la mission ? Sans conviction véritable, elle poursuivit sa route et arriva aux abords d’une voie rapide et fréquentée par un grand nombre de véhicules pétaradants. Beaucoup de sons parasites à cet endroit, et laborieux pour elle de différencier un bruit particulier. Cependant, toutes les perceptions en alerte, elle eut la soudaine et curieuse impression d’être dans deux mondes à la fois. Il lui sembla marcher dans cette réalité, sans toutefois en faire partie. Étonnante sensation qui la fit se questionner. Devait-elle se souvenir de n’être sur Terre qu’une étrangère, une voyageuse ? Lui fallait-il se rappeler de ne pas s’attacher aux choses d’en bas, mais bien à celles qui sont éternelles ?
Alors qu’elle empruntait une rue bondée de touristes, elle s’appliqua à croiser un regard, puis deux. Bientôt, le nombre de personnes s’accroissant, elle ne baissa pas la garde et chercha à accrocher le plus de paire d’yeux. Son comportement pouvait sembler bizarre. On pouvait la croire « illuminée », mais qu’importe, elle croyait avec force découvrir ce qu’elle ignorait encore, et demeurait vigilante pour ne pas rater ce qui lui était destiné en personne.
Beaucoup de monde à cette heure-ci et compliqué de rester à l’écoute et de discerner quoi que ce soit de particulier dans tout ce bourdonnement urbain. Malgré cela, déterminée et volontaire, elle chercha à capter le plus de gens possible, puis tenta de récupérer chez l’un ou chez l’autre, cette réponse de Dieu qui lui appartenait en propre. Persuadée de recevoir de son Seigneur, et agitée à l’idée de possiblement croiser un ange, elle guetta le moindre signe et se dévissa le cou pour scruter de tous côtés.
Tel un chercheur d’or, au passage rapide et furtif des gens pressés ou occupés, elle en dévisagea un maximum et saisit des bribes de conversations. L’oreille ouverte, elle fronça les yeux pour s’emparer d’un mot, d’un geste, d’une attitude de leur part, de ce petit quelque chose qui s’inscrirait en elle comme une évidence, comme un sceau au bas d’une page. Concentrée, tandis qu’elle fendait la foule de plus en plus dense, elle essaya d’agripper chaque élément susceptible d’être important. Elle essaya de mettre dans sa besace et de retenir une phrase interceptée en vol. Une phrase même banale, mais pouvant faire écho dans son âme. Observatrice en apnée et en chasse d’une révélation divine ou d’une confirmation de l’Esprit, elle était à l’affût d’une parole d’encouragement, d’un sourire bienveillant, d’un simple hochement de tête qui lui serait adressé. Pour elle, rien n’était dérisoire ou anodin, et tout pouvait être intéressant et bon à prendre.
Dans sa quête absolue, elle stocka chaque détail et emmagasina chaque impression d’ensemble qu’elle analysa au fur et à mesure, afin de ne garder que l’essentiel et pouvoir continuer sa recherche. Car, oui, elle en était sûre et certaine, si elle ne trouvait pas maintenant ce qu’elle prévoyait, elle le trouverait de toute façon plus tard et sans tarder. De cela, elle en était absolument convaincue, car elle savait que celui qui cherche trouve, que celui qui frappe, on lui ouvre, et que celui qui demande, il lui est répondu. Pour l’instant, ce qu’elle ignorait, c’était simplement le moment et l’heure.
5 – Il était encouragé, par Christ’in
Allongé sur le dos, Josué se libère de son mal-être en pleurant dans ses mains, puis se relève en grelottant. Les yeux hagards, il nettoie sa bouche avec le dos de sa main et reprend sa route. Son pas est lourd. Il n’a pas fait cinq mètres qu’il est déjà exténué et doit s’arrêter pour reprendre son souffle.
Josué enrage contre ses insuffisances, mais sa bonne étoile n’est jamais loin ! Bien qu’invisible aux yeux humains, l’ange d’Adonaï-Élohim arrive à sa rescousse et lui insuffle de nouvelles forces par une imposition des mains. L’effet est immédiat ! Sans savoir ni à qui ni à quoi attribuer ce regain d’énergie, Josué apprécie d’aller soudainement mieux. Regonflé à bloc, il s’ébroue comme un chien détrempé et programme son mental pour la victoire.
« Cours mec ! s’encourage-t-il. Cours ! ».
Pas après pas, sa marche s’affermit. Il trottine, allonge sa foulée et accélère sa vitesse. En quelques minutes, sa course se fait rapide, mais au cœur d’une nuit sombre et détendue, les breloques de métal cousues sur ses vêtements, s’entrechoquent et font du bruit.
Kling ! Klang ! Kling ! Klang ! Les sangles d’acier fixées à son pantalon, les deux boucles en nickel de ses gros ceinturons et ses autres anneaux en fer, cliquettent et résonnent dans le calme environnant. Déconcentré par ces compagnons de voyage aux accents métalliques, Josué continue cependant de courir.
Kling ! Klang ! Kling ! Klang ! Qu’importe ! Le bruit est certes déplaisant, mais il n’entrave pas son déplacement. En revanche, Josué est freiné par son long manteau de cocher et par le poids de ses rangers. S’il veut aller plus vite et s’épuiser le moins possible, il va devoir ménager sa monture et se défaire de ce qui l’encombre. Il ralentit. À petites foulées, il retire sa dague de la doublure intérieure de son cache-poussière qu’il jette sur le bas-côté de la route, et la glisse contre sa hanche en la coinçant dans l’élastique du pantalon. Pour le reste, Josué n’a d’autre choix que de s’arrêter. Et dans l’obscurité silencieuse, il se débarrasse de ses ceinturons et balance sa paire de rangers dans le fossé. Puis, dans un geste symbolique, il arrache de son cou sa croix celtique suspendue à une chaînette d’argent et la lance au plus loin dans un petit cri d’effort.
Volontaire, le sprinter reprend son échappée belle. Il récupère un bon rythme, mais le chemin reste très long jusque chez lui. S’il veut maintenir cette cadence, il va encore lui falloir s’alléger. Et cette fois-ci, c’est sa longue et précieuse dague qui le gène, qui s’enfonce dans son estomac et le fait grimacer. De plus, elle le restreint dans sa mobilité, car le fourreau de la lame bloque la détente de sa jambe. Josué supporte tant qu’il le peut la douleur, mais cette contrainte physique finit par le stopper. Au milieu du chemin, haletant et le front trempé de sueur, il porte la main à son côté. D’un geste sec, il enferme le manche d’ivoire entre ses doigts, lorsque des mots infiltrent son esprit.
— Tu n’en auras plus besoin, lui souffle l’ange d’Adonaï-Élohim. Désormais, il te faudra apprendre à vivre sans…
Josué s’étonne de cette pensée soudaine qu’il juge absurde et sans fondement. Hors de question pour lui de se défaire de sa précieuse lame et de poursuivre la route sans elle. Au fil du temps, elle est devenue le prolongement de sa main et maintenant, elle fait partie intégrante de lui. Dépossédé de sa dague, Josué se retrouverait vulnérable et sans défense. Ne plus l’avoir serait comme sortir nu dans la rue, et cette idée est totalement grotesque, insensée, inenvisageable !
— Tu dois t’en défaire, entend-il de nouveau dans sa tête. Tu dois t’en défaire… car c’est seulement dans ta faiblesse que se révélera la force du Très haut.
Mentalement, Josué lutte contre cette pensée intrusive et insistante, et serre en étau son crâne entre ses mains.
—Non ! grogne-t-il. Plutôt crever ! Jamais !
Apaisé par le calme revenu dans sa tête, Josué cramponne sa dague entre ses doigts et reprend sa course. Son élan est de courte durée. Il ne peut aller aussi vite qu’il le voudrait. Il lui est difficile de cavaler avec son arme au bout du bras, mais tenace et volontaire, il l’empoigne encore plus fort et se concentre sur le but à atteindre. Les yeux fixés sur les lumières au loin de la ville, des scènes de violence forcent son esprit. Et lui revient en pensée, quelques actes délictueux qu’il a faits par le passé. Comme un boomerang de chienlit qui lui reviendrait en pleine face, il est sonné par ces images. Elles le dégoûtent et lui donnent la nausée. Ce qu’il est, le dégoûte aussi. Et ce dégoût se multiplie lorsque l’image du Lion de Judas s’impose à lui dans un flash, et que des mots tels que « répugnance », « regret » et « honte » tournent en boucle dans sa pensée, avant qu’il ne soit submergé de questions : « Pour qui ? Pourquoi ? Pour ça… »
Josué est comme éclairé par le mal qu’il a semé, et alourdi par le sombre état de son cœur. La honte et la culpabilité le recouvrent et l’alourdissent comme un épais voile de ténèbres. Déstabilisé par ce qui passe en lui, il modère sa vitesse, et alors qu’il traverse seul cette nature endormie, il réalise qu’il a fait de mauvais choix, qu’il a cru en de fausses promesses, qu’il a payé très cher le prix de la liberté, de la force et du pouvoir, et qu’il continue de devoir s’en acquitter. Le bilan est terrible. Josué prend conscience qu’il a beaucoup perdu et a perdu jusqu’à sa dignité… Quel gâchis !
Il se sent piteux, misérable. Sa dague au bout des doigts lui fait soudain horreur. Voilà qu’il l’associe à toute cette merde et la juge en partie responsable de ses débordements. Comme une révélation, sa lame n’est plus la compagne idéale et indispensable, mais elle est l’objet du mal, l’associée du diable. Elle lui fait horreur. Elle lui brûle les doigts. Et dans un grognement de rage, il la lance dans les buissons bordant la route, puis repart en grande foulée.
Kling ! Klang ! Kling ! Klang ! Josué fonce à toute allure, mais la charge de sa souffrance est trop lourde à porter. Il s’arrête net, écarte en grand les bras et se vide de son tourment.
— Non ! Non ! hurle-t-il. Nooooonnnn !
Un bref instant, l’écho de ses cris troublent la quiétude de la nuit. Mais le moment est fugace. Après avoir capturé son éphémère détresse dans son suaire de ténèbres indolentes, la pénombre l’emprisonne à jamais, et plus rien ne s’entend. Et de la même manière que l’obscurité a retrouvé son calme, Josué se sent beaucoup mieux. Délesté de ses fardeaux du moment, il parcourt à vive allure les derniers kilomètres.
6 – Elle était attentive, par Myriam Craddock ⭐
La salle paroissiale était à peine remplie, le pasteur sur sa chaire prêchait avec simplicité, une petite Bible noire à la main. Sur le premier rang on pouvait observer deux femmes d’un certain âge qui se chuchotaient les derniers ragots. Au centre un vieil homme s’était endormi, les mains croisées sur le ventre, et sur le dernier rang un groupe d’adolescents était penché sur leurs téléphones. L’ennui pesait dans la salle. Néanmoins, mon attention fut attirée par une jeune fille assise dans un coin, près de l’orgue. Elle portait une simple petite robe bleue avec des boutons de nacre, ses cheveux châtains étaient noué dans un chignon bas. Ses yeux noirs étaient rivés sur le pasteur. Elle buvait ses paroles. Des larmes ruisselaient sur ses joues roses. Et je dois vous dire que bien que son allure fut d’une banalité extraordinaire, sa foi et son attention à l’égard de Dieu la rendait d’une beauté inexplicable. Ses yeux étaient tels des diamants éclatants et son visage était rayonnant d’une lumière merveilleuse. Jamais je n’avais vu de femme aussi belle… Jamais je n’avais contemplé une âme aussi douce… Vous me direz qu’elle était simplement attentive… Mais cela me bouleversait.
7 – Il était encouragé, par Moniche Elchinger
Il était encouragé par une intervention spéciale.
L’eau courait, rapide, dans le torrent du Cédron. De l’autre côté se trouvait un grand jardin planté d’oliviers aux troncs noueux. De grosses pierres jalonnaient le sol sablonneux. De larges allées invitaient à la découverte du domaine.
La bande des douze, arrivée en ce lieu qui leur était familier, ployait sous le poids d’une tristesse incommensurable. L’atmosphère était lourde, pas un souffle d’air ne traversait l’espace. Les feuillages demeuraient parfaitement immobiles, et les parfums restaient en suspension comme s’ils avaient été mis dans des bouteilles encapuchonnées.
Les douze restèrent à la distance d’un jet de pierres du fils de l’homme et sombrèrent dans un drôle de sommeil.
Selon sa coutume, l’homme de douleur était venu là. Pourtant habitué à la souffrance, il affrontait de terribles frayeurs. Agenouillé et face contre terre , il était submergé par d’atroces angoisses . Dans son âme se livrait un combat cruel dont l’issue allait sceller le sort de l’humanité. A grands cris, il s’adressait à Celui qui pouvait le retirer de la détresse.
Quand sa volonté propre eut capitulée, un événement surnaturel se produisit. Le ciel s’ouvrit et un ange, d’un vol rapide, s’approcha de lui. L’ange le toucha et lui parla. Abandonné des hommes, l’homme de douleur fut soutenu par une connexion divine. La présence angélique le fortifia.
Il priait plus instamment, au point que sa sueur devint comme des grumeaux de sang. L’homme brisé marcha vers son terrible destin. Au loin, le torrent roulait ses eaux vers la vallée.
Il est devenu pour tous ceux qui lui obéissent l’auteur d’un salut éternel.
8 – Il est encouragé (l’aveugle-né), par Alain Guegan
Comme d’habitude, il fait l’aumône près du temple. Il mendie.
Il est né aveugle. Au début, cela a été un tremblement au sein de sa famille, beaucoup de questions ont fusé.
Qui a péché ?
Pourquoi cela leur est-il arrivé ?
Les années sont passées. Aujourd’hui, il est assis dans le temple. Rien de nouveau ne vient chambouler sa vie. Il est là, jusqu’à la fin de la journée. Tout à l’heure, il se lèvera pour retourner chez ses parents. Une monotonie s’est installée dans sa vie. Il n’attend rien de particulier. Cela fait bien longtemps, qu’ il a accepté sa situation.
Même si ce n’est pas toujours facile, il y a toujours des petits malins qui lui mettent des embûches pour le faire tomber.
Très souvent, il fait d’horribles cauchemars.
Il a ce désir enfoui en lui d’être voyant. Il sent la chaleur du soleil lui caresser le visage. Cependant, il ne voit pas le soleil, ni le bleu du ciel. Il ne sait pas, ce qu’est le bleu, le blanc, le rouge et le vert. C’est comme ça et il n’y peut rien. Il est condamné à cette existence d’aveugle qui fait de lui un mendiant.
Aujourd’hui, pendant son trajet de chez lui au temple pour demander l’aumône aux passants, il entend un groupe de personnes parler d’un cas semblable au sien. Il se dit en lui-même: « Y aurait-il, à côté de moi, un aveugle-né ? »
Il entend de nouveau ce questionnement : « Qui a péché ? »
Une question qui lui rappelle une problématique soulevée par son entourage quand il était enfant. Il se souvient que les réponses fusaient. Néanmoins, rien n’avait réglé sa situation.
Dans ce groupe de personnes qui parlent, une voix discordante se fait entendre « C’est pour la gloire de Dieu que cet homme est né aveugle. »
Quelle drôle de réponse ! se dit-il. Soudain, il sent des mains déposer un emplâtre à base d’eau et de terre sur ses yeux. Comme quand Dieu le fit quand il créa l’homme.
Quelle sensation bizarre que ce geste intrusif et créateur. Un homme s’est invité dans sa vie peinarde et monotone.
Pourquoi a-t-il fait cela ?
Il se passe quelque chose d’étonnant en cet instant. Cet homme lui dit : « Va à Siloé et lave-toi. »
Il se lève avec cette boue sur ses yeux et se dirige en tâtonnant dans les rues pour aller à l‘autre bout de la ville, à la piscine de Siloé. Personne ne l’accompagne. Pas même cet homme mystérieux. Pourtant, une force incompréhensible le pousse à marcher vers cet endroit pour se laver les yeux. Les paroles de cet individu « Va te laver à Siloé » et ce cataplasme qui lui a été posé lui donne de la hardiesse pour accomplir le trajet.
Il arrive devant la piscine de Siloé. Il est très fatigué, mais la curiosité, et l’espoir si minime de découvrir le pourquoi de cet emplâtre posé sur ses yeux, l’emporte sur le reste. Il accomplit ce dernier geste. Il porte l’eau avec ses mains jusqu’à ses yeux pour enlever cette boue.
C’est alors que se produit l’impensable. Les yeux livides et morts prennent vie et les rétines sans couleur deviennent marron.
Il voit maintenant les couleurs autour de lui. Il voit le soleil, le ciel bleu, le rouge, le vert et bien d’autres couleurs. Il voit, il le crie : « Je vois , c’est un miracle, avant j’étais aveugle, maintenant, je vois ! »
Il témoigne à qui veut l’entendre : « L’homme que l’on appelle Jésus a fait de la boue, il me l’a appliqué sur les yeux ». Il m’a dit : “Va à Siloé et lave-toi ». « Il m’a mis de la boue sur les yeux, je me suis lavé, et je vois. J’étais aveugle, et à présent, je vois ».
Plus il est obligé de rendre compte de sa guérison, plus cela en dit long sur son guérisseur. Il passe de l’homme jésus, à l’homme prophète pour en arriver à son maître, à son Dieu, à son Seigneur.
9 – Il était recueilli, par Jake
Mais qu’est-ce qu’il fait encore dehors ?! Et tous les soirs c’est la même chose… À son âge, franchement, c’est pas sérieux, à son âge, c’est même dangereux ! Faut dire que dans la région, les éléments météorologiques forment une race à part. Loin d’être bienveillants à l’égard des humains qu’ils côtoient, ils déambulent maladroitement comme des géants d’une autre ère, aigris par une chute ancestrale dont personne ne semble se souvenir à part eux. Le vent toujours en colère vous hurle dans les oreilles, vous pousse ça et là pour vous faire tomber du trottoir et vous pince la nuque dès qu’il la voie. Les nuages sont boudeurs, moroses, constamment sur le point d’éclater en sanglot. Le soleil est inexistant, astre couard qui ne semble s’inquiéter que de lui-même et qui, de toute évidence, s’est soumis aux ténèbres depuis longtemps. Et pourtant le v’là ! Le vieil homme de la maison du fond, marchant seul. Alors qu’on sait très bien qu’il ne va nulle part ! Emmitouflé dans son vieux manteau de laine tout craqué. Son nez dépasse à peine de la meurtrière que dessinent son bonnet trop grand et son écharpe trop épaisse. Mais que cherche ce corps, camouflé et fragile, en s’aventurant périlleusement sur les pavés glissant qui n’attendent que de lui briser le fémur ? Qu’y a-t-il donc derrière le rempart de ce visage plissé par le froid qui brave sans raison les héros déchus et leur courroux ? Qu’y a-t-il donc derrière le rempart de ce visage plissé par le froid qui brave sans raison les héros déchus et leur courroux ?
Pour le savoir, approchons-nous d’un peu plus près. D’un sourire discret, le vieil homme nous invite à entrer dans le palais de son âme. Sans geste brusque, passons tranquillement le verrou froid et dur de son front. Voilà, nous y sommes. Il y a juste une pièce, hermétique aux diables et aux cris du vent, vaste comme l’univers, profonde comme l’amour, solide comme la vie. Instinctivement, nous enlevons nos chaussures sales. En guise de foyer, des émotions qui n’ont besoin que de mots pour continuer de brûler joyeusement. Les tapisseries sont faites de lettres qui existent pour elles-mêmes, sans avoir à former de phrases, chaque lettre est une histoire, celle de l’humanité. Quiconque y entre s’y sent bien, s’y sent au chaud. Ici, loin du vacarme de l’ennui, toutes ses pensées n’ont qu’un seul désir, vous prendre par la main pour vous mener à l’espérance. La gloire y brille avec douceur, pour toujours, parce qu’il connait la vérité qui rend vainqueur de toutes intempéries, de toute médisance, et de tout ce qui se peut nommer, sur la terre et dans les cieux.
10 – Il était encouragé, par Justine ⭐
Julien releva la tête et regarda fixement les aiguilles de l’horloge accrochée au mur immaculé de sa petite chambre d’étudiant. 16H22. Cette mansarde, qui quelques minutes plus tôt ressemblait à une geôle, lui apparaissait tout à coup bien différente. Il lui semblait à présent que l’espace autour de lui s’était agrandi, qu’il avait gagné en hauteur et en profondeur.
Comment était-ce possible ? Était-il en train de rêver ?
Un nouveau coup d’œil à l’horloge lui confirma que les minutes s’égrenaient toujours au même rythme, lent, tranquille, rassurant. Ce qu’il vivait était donc bien réel.
Il remarqua soudain que son front s’était déplissé, comme si une brise chaude l’avait défroissé. Aux battements réguliers de son cœur, il s’aperçut avec soulagement que sa respiration avait retrouvé son tempo moderato.
Il s’étonna même de constater que ses lèvres formaient un joli sourire, sans qu’il ait à les commander. Pour la première fois depuis plusieurs jours, il fut surpris de penser au lendemain sans boule au ventre ni gorge serrée.
Il caressa avec douceur les pages jaunies et froissées de ce livre qui ne le quittait jamais et qui, une fois encore, s’était révélé lumière sur son sentier.
Alors qu’il s’apprêtait à savourer une tasse de thé, une douce certitude infusa son esprit, comme une vague recouvre progressivement le sable doré de la plage : peu importe ce qui l’attendait, il allait s’en sortir car il n’était plus seul…
11 – Elle était attentive, par Erika Michel
Je buvais ses paroles. Je ne pouvais me détacher de son visage rassurant. Il était si calme. Ses lèvres, plutôt fines, articulaient chacune des syllabes prononcées. Chacun de ses mots venait percuter mon cœur. Je n’entendais plus le brouhaha de la foule, il ne restait plus que lui et moi. J’étais transportée, l’air venait me caresser le visage. Une bonne odeur de pain chaud flottait dans l’assemblée. Je le regardais rompre des morceaux pour chacun. Ses mains étaient aussi larges que celles de mon père et, pourtant, … elles paraissaient aussi douces que celle de ma mère. Lorsqu’il me tendit une part, nos regards se croisèrent et ses yeux noisette me transpercèrent littéralement. J’avais le sentiment qu’il lisait en moi, sans que ne puisse m’interposer. J’eus honte et je me sentis rougir, me recroqueviller . Mais il tendit son autre main vers ma joue qu’il effleura et me dit :
– Mange, ta foi t’a sauvé …
L’un des critères‚ je dirais que c’est le fait que le texte soit court !
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C’est tout à fait vrai, bravo ! Le défi indiquait la production d’un paragraphe, sans préciser la longueur. Cependant, mes quelques conseils pouvaient laisser entendre que j’attendais une forme courte (sans refuser les longues). C’est probablement subjectif, mais je trouve que les descriptions, comme les blagues, sont assez souvent meilleures quand elles sont courtes…
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