Par A. Rousseau, en réponse au défi d’écriture sur l’habitude.
Habitude, habitude, es-tu le doux repos
Où mon intelligence a droit de s’arrêter ?
Plutôt que d’inventer, elle va imiter.
Ainsi marche la meute, ainsi va le troupeau.
Habitude, habitude, es-tu ensorceleuse,
Caresses et étreintes auront-elles une fin ?
Je les attends toujours, oui, toujours j’en ai faim,
Sans elles une journée ne se dit pas heureuse.
Habitude, habitude, Adam n’en voulait pas.
Il désira un jour cueillir une autre pomme
Pour un meilleur parfum et imiter, en somme,
Eve ! Avoir le plaisir de goûter cet appât.
Habitude, habitude, aurais-tu cette force
De muer les citoyens en pleutres automates ?
Pour leur faire adopter ces idées scélérates
De l’oubli de l’Amour menant vers le divorce.
Habitudes, habitudes, il faudrait un François
Pour que tous les regards ne portent plus sur Rome,
Qu’un synode se tienne et qu’à la fin il nomme
L’Esprit Saint seulement pour proclamer la Foi.
Habitude, habitude, as-tu un double jeu,
Sourires aux jours faciles ou grimaces aux jours noirs ?
Aux yeux de mon esprit, tu peux te laisser voir
Ou rester bien cachée en m’oubliant un peu.
Habitude, habitude, es-tu cadeau de Dieu
Pour m’assister un peu, seconder ma nature,
Permettre de mener de ma vie l’aventure
En Lui gardant mémoire, en tout temps, en tout lieu ?
Tu vois, je te connais, mais me méfie de toi,
Tu m’aides au long des jours, mais tu sais m’endormir.
Reste donc près de moi sans vouloir m’asservir.
Oui, habitude aimée, ne me fais pas la loi !
A Rousseau
Plumes Chrétiennes 