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La prière de l’artisan

Apprends-moi, Seigneur, à bien user du temps que tu me donnes pour travailler, à bien l’employer sans rien en perdre.

Apprends-moi à tirer profit des erreurs passées sans tomber dans le scrupule qui ronge.

Apprends-moi à prévoir le plan sans me tourmenter, à imaginer l’oeuvre sans me désoler si elle jaillit autrement.

Apprends-moi à unir la hâte et la lenteur, la sérénité et la ferveur, le zèle et la paix.

Aide-moi au départ de l’ouvrage, là où je suis le plus faible.

Aide-moi au coeur du labeur à tenir serré le fil de l’attention.

Et surtout comble Toi-même les vides de mon oeuvre, Seigneur!

Dans tout le labeur de mes mains laisse une grâce de Toi pour parler aux autres et un défaut de moi pour me parler à moi-même.

Garde en moi l’espérance de la perfection, sans quoi je perdrais coeur. Garde-moi dans l’impuissance de la perfection, sans quoi je me perdrais d’orgueil.

Purifie mon regard: quand je fais mal, il n’est pas sûr que ce soit mal, et quand je fais bien, il n’est pas sur que ce soit bien.

Seigneur, ne me laisse jamais oublier que tout savoir est vain sauf là où il y a du travail, et que tout travail est vide sauf là où il y a amour, et que tout amour est creux qui ne me lie à moi-même et aux autres et à Toi, Seigneur!

Enseigne-moi à prier avec mes mains, mes bras et toutes mes forces.

Rappelle-moi que l’ouvrage de mes mains t’appartient et qu’il m’appartient de te le rendre en le donnant ; que si je le fais par goût du profit, comme un fruit oublié je pourrirai à l’automne ; que si je le fais pour plaire aux autres comme la fleur de l’herbe je fanerai au soir ; mais si je le fais pour l’amour du bien, je demeurerai dans le bien ; et le temps de faire bien et à ta gloire, c’est tout de suite, Amen!

De l’origine de cette prière

Nous avions d’abord attribué cette prière à des copistes et enlumineurs du haut Moyen-âge anglais et nous la pensions antérieure au XIIe siècle. C’est la source que l’on trouve couramment sur Internet, par exemple ici.

Cependant, un internaute nous offre un autre éclairage (15 décembre 2022) :

Bonjour,
Je me permets de vous signaler une erreur concernant la « prière de l’artisan ». Contrairement à une légende récente mais tenace, elle n’a pas été composée par un obscur moine anglais antérieur au XIIe siècle, mais compilée par Philippe Ferrand, compagnon de l’Arche de Lanza del Vasto, sur demande expresse de ce dernier, et sur la base de quatre textes, au milieu du XXe siècle. Les auteurs en sont :
– Jean Guitton (dans Prières pour les incontournables de la vie), premiers paragraphes de la prière
– Marie Noël (dans Notes intimes), à partir de « Seigneur, dans tout le labeur de mes mains… »
– Khalîl Gibrân (dans le Prophète, chapitre sur le travail), à partir de « Seigneur, ne me laisse jamais oublier… »
– et Lanza lui-même (dans Judas), à partir de « Seigneur, enseigne-moi à prier… ».
Philippe Ferrand, qui est encore de ce monde, pourra vous le confirmer. Il est membre de la communauté de l’Arche de Gwenves, en sud-Finistère. C’est un homme adorable.
BB.

D’après mes recherches, cette origine serait effectivement la bonne, un grand merci à l’auteur du message !

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