Par Jean-Michel Bloch, série Gestes de création
Il regarde sa montre : il est vingt heures. L’heure d’y aller. Il a attendu ce moment toute la journée. Se rendre à l’atelier théâtre. Sortir du cadre quotidien. Il crie : « J’y vais ! », comme une libération. Il sort de l’appartement. La cage d’escaliers du bâtiment est grise. De boîte en boîte, il passe dans l’ascenseur. Rez-de-chaussée. Et là, il retrouve les autres.
Ils sont une petite dizaine, chacun sorti de sa grisaille. Ils sont là, rassemblés chaque semaine pour deux heures de bonheur attendu. Ils se connaissent, mieux que tous ceux qui ne font que se dire, entre deux portes : « Bonjour, ça va ? » Car pratiquer le théâtre, ensemble, c’est une manière de se dévoiler, à autrui. Sinon, il ne verrait en eux que cette apparence, terne, de ceux qui, comme étrangers à eux-mêmes, sont fatigués de leur vie, des trajets quotidiens de la banlieue, du travail routinier, du peu d’échanges vrais. Ils sont quelques uns, d’âges différents, hommes et femmes. C’est le théâtre qui les rassemble. Mais c’est aussi la personnalité solaire de cette femme, Margrete, une hollandaise, mère de deux enfants, qui a pris l’initiative de cet atelier.
« Bonjour, ma Mimi, tu as remonté tes cheveux ! ça te va bien … »
Elle parle avec cet accent, si particulier, comme un pas traînant sur un chemin rocailleux, qu’il aime tant.
Lire la suite sur Evangile 21
Jean-Michel Bloch fait partie du jury de notre nouveau concours littéraire (jusqu’au 31 mars 2025).
Il suit des études de lettres modernes, avant de devenir professeur en lycée. Il donne également un cours de « Pensée contemporaine », à l’Institut Biblique de Genève, depuis 1996. Membre de Majestart et collaborateur de plusieurs collectifs d’artistes, il a rédigé l’essai « L’art pour Dieu ? ». Il écrit également des nouvelles et des articles pour les sites Evangile 21 et imagoDei.
