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Le pays où il faisait toujours sombre et froid

Il était une fois, un pays lointain où il faisait toujours nuit. Il y avait belle lurette que le soleil ne montrait plus ses rayons et que, seule la lune éclairait le ciel de sa blanche et pâle lumière, lorsqu’arrivait le moment du soir. Le reste du temps, aux heures de la journée, l’obscurité était totale. Ainsi, les habitants sortaient plutôt la nuit et s’endormaient à l’aube.

Ne jamais voir la clarté du jour, la plupart des gens y étaient habitués puisqu’ils n’avaient connu que les ténèbres du dehors. En revanche, ceux âgés de plus de soixante-dix ans, qui avaient savouré l’éclat du soleil au-dessus de leurs têtes et avaient dû apprendre à évoluer dans ce noir complet comme un aveugle ayant subitement perdu la vue, pour eux ce changement fut extrêmement difficile. Beaucoup n’avaient pu supporter de vivre sans la lumière naturelle, essentielle et nécessaire, et le désespoir les avaient conduits dans la tombe.

— Il y a bien longtemps de cela, raconta grand-mère Gontrand au coin de la grande cheminée du château endormi, aux deux enfants qui l’écoutaient attentivement. Oui, il y a bien longtemps, bien avant votre naissance, ce pays était un endroit incroyable, si merveilleux. La vie y était simple et douce. Le loup habitait avec l’agneau, la panthère dormait à côté du chevreau, le lion, l’ours et le bœuf mangeaient ensemble, et leurs petits partageaient le même pâturage. 

Assis autour de la vieille dame, la princesse Sinaï de Forever et le prince Maxence de Wolverine regardaient ses doigts qui tricotaient et sa pelote qui diminuait, tandis que le pull de Noël destiné à son mari, qu’il avait voulu de couleur bleu pétrole avec une grosse étoile jaune au milieu, prenait forme au niveau des manches qui s’allongeaient à mesure que les aiguilles cliquetaient.

— Il faisait toujours beau dans ce pays, dit-elle, entortillant la laine entre ses doigts plissés. Le soleil éclairait le jour et la lune embrasait la nuit. C’était un endroit où il faisait bon vivre. Des jardins aux milles couleurs et de vastes prairies pleines d’arbres aux fruits succulents, s’étendaient à perte de vue, et des ruisseaux limpides dans lesquels frétillaient des poissons d’argent, couraient au milieu de toute cette abondance. 

Le prince Maxence de Wolverine appelé aussi super Max pour sa bravoure exemplaire, et Sinaï, surnommée la petite guerrière pour sa grande sagesse et sa grande volonté aimaient beaucoup cette histoire qu’ils connaissaient par cœur, surtout lorsque grand-mère Gontrand, qui avait connu cette époque où le soleil brillait haut dans un ciel bleu turquoise et que sa lueur réchauffait les corps et les cœurs, leur racontait tout dans les détails. Ils adoraient quand elle expliquait que les rayons flamboyants faisaient pousser des multitudes de fleurs aux variétés de couleurs, et ils essayaient de se représenter ce foisonnement de teintes sans pouvoir y parvenir.

— Oh, bien sûr, il arrivait parfois que de mauvaises herbes poussent de ci de là, ajouta la vieille femme. Mais, il suffisait de les arracher pour que tout soit à nouveau paisible, harmonieux et joyeux. Tout était parfait, et l’amour était partout présent, comme un fleuve d’eau vive qui coulait en continu et dans lequel chacun pouvait venir s’abreuver à toute heure. C’était là le meilleur des mondes. Un monde parfait et joyeux jusqu’à ce jour de grand malheur, ce jour terrible et apocalyptique.

Les deux enfants avaient de la difficulté à s’imaginer que ces terres aussi sombres, froides et tristes, aient pu être à ce point fantastiques. Ils jetèrent un œil vers l’unique fenêtre de l’immense pièce aux murs et au plafond recouverts de tentures, de manière à conserver une certaine température. Au-dehors, le vent glacial rugissait derrière les carreaux givrés et les premiers flocons de neige tapissaient la cour gelée de leur château. La vielle femme ,qui n’était pas vraiment la grand-mère des deux enfants, mais leur gouvernante attitrée depuis leur naissance, semblait perdue dans ses pensées et contemplait en silence les flammes qui crépitaient dans l’âtre ouvert.

— Continue, mamynou, ne t’arrête pas, dit Sinaï d’une petite voix suppliante. On veut savoir ce qui s’est passé.

— Oui, oui ! Dis-nous vite la suite, s’impatientait Maxence.

Des larmes coulaient sur les joues de la pauvre femme qui se remémorait l’époque ancienne. Elle adressa un sourire mélancolique aux deux enfants, reprit son ouvrage et poursuivit son récit :

— Elle s’appelait Sinaï, tout comme toi, ma précieuse enfant. C’était votre grande tante. Quelle adorable enfant ! Une petite princesse si gaie, si jolie, si pleine de vie. Sa famille, vos grands-parents, ils étaient si heureux de la voir grandir, s’épanouir et devenir chaque jour plus belle et plus intelligente. Elle était la seconde demoiselle de la fratrie royale et tout était parfait, jusqu’au jour où… quelque chose d’inimaginable, quelque chose d’innommable et d’absolument injuste arriva. Quelque chose de totalement imprévu débarqua sans crier gare et s’imposa à la princesse Sinaï et aux siens comme un coup de tonnerre dans un ciel sans nuage.

La vieille femme fit une pause pour reprendre son souffle et expliqua ce qui avait plongé leur pays dans les ténèbres les plus profondes et avait transformé les cœurs, les pensées et l’environnement, puis chassé l’espoir, l’amour et la joie dans ce pays. La petite princesse avait huit ans lorsqu’elle s’était soudainement plainte de son genou. Inquiets, mais bien loin d’imaginer que c’était quelque chose de grave, ses parents l’avaient emmenés au dispensaire le plus proche. Tout le monde pensait que ce n’était rien de plus qu’une petite douleur passagère, mais les médecins découvrirent une méchante boule, du nom d’ostéosarcome, en train de grossir et d’abimer l’os de sa jambe. Il fallait l’enlever le plus vite possible avant qu’elle ne s’éparpille partout dans son corps et ne mette sa vie en danger. Ses parents étaient fous de douleur lorsqu’ils apprirent la nouvelle.

Personne ne voulait croire qu’une telle chose puisse être possible. Comment cela pouvait-il se produire dans ce pays où, hormis quelques mauvaises herbes à traiter de ci de là, rien de dramatique ne devait survenir ? Tous étaient persuadés, que comme ce pénible chiendent qui repoussait de temps à autre et qu’il fallait arracher pour que tout soit de nouveau parfait, une opération débarrasserait leur adorable princesse de cet intrus envahissant, et qu’elle pourrait de nouveau aller courir dans les jardins aux mille couleurs et chevaucher de fougueux pur-sang qu’elle savait dresser malgré son jeune âge. Hélas, rien ne se passa comme prévu et la maladie emporta Sinaï pour toujours. Alors qu’elle s’était battue comme une véritable guerrière pour recouvrer la santé, elle perdit malheureusement ce combat et dût quitter sa famille, ses amis et tous ceux qui l’aimaient pour un pays inconnu, un pays dans lequel les enfants ne devaient pas aller avant d’avoir le visage aussi ridé qu’une pomme pourrie. Son départ plongea tout le pays dans la plus sombre des nuits. Ses proches, les gens de la cour et la population, tous pleurèrent l’absence de la si jolie et si talentueuse princesse, et le ciel commença à se couvrir de nuages ternes. Chaque jour qui passait, l’amour diminuait et le soleil brillait de moins en moins, alors que la tristesse augmentait et que l’obscurité s’imposait. Puis, ce fut au tour de la colère d’empoisonner le cœur des gens. Il devint dur comme de la pierre et l’amour n’y trouva plus sa place. Les ténèbres prirent le pouvoir de ce pays et la paix quitta cet endroit pour ne plus s’y présenter. Partout, dans les maisons, les disputes éclatèrent et le pardon ne se partagea plus. La férocité contamina aussi la faune et les animaux s’entredévorèrent. Ils furent sans pitié les uns avec les autres, alors que la nature privée de lumière, dépérissait pour ne plus repousser.

Pour une fois, Sinaï et Maxence auraient bien aimé que « mamynou » invente une autre fin à cette histoire si tragique, mais comment changer le cours des choses quand les mauvais sentiments affectent tout, que les cœurs, pleins de regrets et de questions sans réponse, se ferment à tout jamais, que l’absence est comme un tison sorti des braises qui transperce la poitrine, et que les yeux délavés d’avoir trop pleuré ne savent plus regarder qu’en arrière, qu’à hier, qu’à cet avant si heureux qui ne reviendra plus ?

Tous les deux se sentaient bien fatigués. Il était tard et la nuit de Noël s’annonçait dans quelques jours. Chargés de ce récit qui alourdissait leurs âmes, ils montèrent se coucher en songeant à cette fête, qui, cette année encore, allait se dérouler sans joie, sans espoir et sans amour. Avant de se quitter et d’entrer dans leurs chambres, la princesse Sinaï de Forever dit à voix basse :

— Et si on retrouvait la lumière, peut-être que tout redeviendrait comme avant ?

— Hé, hé… ça se pourrait bien, acquiesça Maxence avec un grand sourire. Mais comment faire pour la trouver ?

À la différence des adultes dont le cœur était fermé à toute forme de confiance et d’espérance depuis des décennies, celui des enfants conservaient une petite flamme de foi qui s’éteignait généralement pendant l’adolescence.

— Demain, nous partirons en quête de la lumière, annonça Sinaï.

— Oui, nous devons le faire et sans tarder, approuva Maxence. Bientôt, notre cœur deviendra aussi dur que celui des grandes personnes et il nous sera difficile de croire à l’impossible.

Le lendemain, leur petit-déjeuner avalé, super Max et la petite guerrière se couvrirent chaudement pour affronter la neige, puis se munirent de lampes pour percer l’épaisse obscurité du jour qui pourraient bien les surprendre selon le temps que leur prendrait cette mission. Sans en parler à leur famille ni à aucun adulte qui les auraient certainement découragés et empêchés de se lancer dans cette folle et audacieuse aventure, ils partirent sur la pointe des pieds, juste armés de la flamme de la confiance qui brillait encore en eux. La grande sagesse et la volonté farouche de la princesse Sinaï de Forever et la bravoure légendaire de Maxence de Wolverine allaient aussi les aider dans cette intrépide mission. Au-dehors, la lune blafarde ne se montrait que d’un quart et le chemin sinueux à emprunter se distinguait à peine.

— Est-ce que quelqu’un sait où se cache la lumière ? chuchotaient-ils à tour de rôle. Est-ce que quelqu’un sait où se cache la lumière ?

Pas de réponse en retour de leurs demandes. Rien ne s’entendait dans la noirceur sommairement éclairée du mince faisceau de leurs lampes de poches. Avancer dans la neige molle et endurer le souffle glacial de l’hiver éternel, était dur et exténuant, mais le prince et la princesse continuaient vaille que vaille, sans cesser d’interroger :

— Est-ce que quelqu’un saurait où se cache la lumière ?

Soudain, un grondement gigantesque perça l’opacité de la nuit et les fit se serrer l’un contre l’autre.

— Qui va là ? tonna une voix.

— Nous… nous cherchons la lumière qui éclaire les cœurs ? répondirent le prince et la princesse d’un même élan.

Un bruit de pas énorme résonna dans la nuit et une énorme lanterne oscilla au-dessus d’eux.

— De quel droit cherchez-vous cette lumière ?

La flamme vacillante de la lanterne éclaira le visage massif et barbu d’un homme mesurant plus de trente pieds de haut. C’était un géant qui aurait pu les croquer tous les deux et les avaler comme une vulgaire bouchée de pain. Terrorisés, leur langue était collée à leur palais et ils tremblaient sur leurs jambes.

— Qui vous autorise à la chercher ?

— Per… personne, répondit super Max, choisissant la bravoure plutôt que l’inquiétude, c’est juste notre cœur qui nous dit de le faire.

— Ah, je vois, gronda le géant. Votre cœur est encore simple, n’est-ce-pas ?

Volontaire et courageuse, Sinaï s’exprima d’une seule traite pour ne pas bredouiller face à celui qui l’effrayait beaucoup :

— Certainement, puisqu’il y a encore de l’espérance en nous, dit la sage demoiselle. L’espérance de trouver la lumière.

— Eh bien, qui cherche, trouve, renseigna le géant. Alors, continuez sans vous lasser. Si vous persévérez, vous finirez par obtenir ce que vous désirez.

À cet instant, tous les deux pensèrent que cette montagne de chair n’était pas aussi féroce qu’elle y paraissait, sans se douter que s’ils s’étaient laissés impressionner et avaient fait demi-tour, ils n’auraient pas reçu cet encouragement qui leur donna davantage de vaillance et d’ardeur à aller au bout de leur projet, et permit à la petite flamme en eux de grandir et de grossir. Le géant se déplaça pour les laisser passer et ils le remercièrent chaleureusement. Mais alors qu’ils le doublaient, ils s’aperçurent que le colosse rapetissait jusqu’à avoir la taille d’un lutin. Ils se félicitèrent d’avoir réussi cette épreuve de témérité, malgré leurs appréhensions, puis continuèrent leur chemin en murmurant :

— Est-ce que quelqu’un saurait où se cache la lumière ?

Soudain, un rire diabolique les tétanisa sur place.

— Qui va là ? dit une voix moqueuse.

— Nous cherchons la lumière qui éclaire les cœurs, répliquèrent-ils de concert.

Une bougie allumée dans une citrouille éclaira un visage malfaisant au regard machiavélique.

— De quel droit cherchez-vous cette lumière ? Qui vous autorise à la chercher ?

— Personne, indiqua Sinaï, c’est juste notre cœur qui nous demande de le faire.

— Ah, je vois, se gaussa le démon. Votre cœur est encore simple, n’est-ce-pas ?

— Certainement, puisqu’il y a encore de l’espérance en nous, informa Maxence. L’espérance de trouver la lumière.

— Et vous pensez être capable de la découvrir en continuant sur cette route, mais ce n’est pas de ce côté qu’elle se cache. Par ici, c’est une voie sans issue et vous finirez par tomber dans un gouffre duquel vous ne saurez réchapper et dans lequel vous périrez corps et âme. Retournez d’où vous venez, la flamme de votre confiance n’est plus assez haute et suffisante pour traverser cet abîme qui pourrait bien vous engloutir à tout jamais.

— Mon cœur me dit que vous mentez ! dit Sinaï avec aplomb. Je refuse d’écouter vos tromperies ! Nous irons par là sans regarder ni à droite ni à gauche, puisque c’est ainsi que nous le ressentons à l’intérieur de nous et nous réussirons !

— Bien vrai ! dit Maxence, poussant rudement le démon dans le fossé rempli de ronces. Hors de question de faire demi-tour, allez au diable !

Grâce à leur persévérance et à leur assurance, les enfants ne savaient pas que leur flamme croissait et augmentait leur détermination à croire que la victoire était au bout de ces épreuves. Malgré la tempête de neige qui s’était levée et qu’ils devaient affronter, ils progressèrent avec audace dans ce noir de poix en demandant à mi-voix :

— Est-ce que quelqu’un saurait où se cache la lumière ?

Un rugissement les fit sursauter. Puis, dans un grognement assourdissant, ils entendirent :

— De quel droit cherchez-vous cette lumière ? Qui vous autorise à la chercher ?

— Personne, dit Maxence qui s’était bouché les oreilles pour protéger ses tympans, c’est juste notre cœur qui nous dit de le faire.

Dans un grondement plus assourdi, une question leur fut posée :

— Et c’est aussi votre cœur qui vous a dit de ne pas rebrousser chemin face au géant et au diable ?

— Oui, c’est la flamme de l’espérance en nous qui nous a convaincu d’accomplir cette mission ! expliqua Sinaï avec cran. Malgré toutes les difficultés sur notre route, nous sommes certains que nous la verrons, parce que celui qui cherche trouve !

— C’est ça ! avait confirmé Maxence. Même si ça semble impossible, on y croit de toutes nos forces !

À ces mots, une grande lumière illumina le fauve couronné qui se tenait en majesté devant eux.

— Je suis la lumière qui peut faire disparaître les ténèbres. Je suis l’incomparable lumière qui ouvre le chemin de la guérison, du pardon, de la consolation et de la paix.

Sinaï et Maxence sentaient la chaleur bienfaisante qui se dégageait du lion royal. Ils étaient si heureux et si excités d’avoir trouvé celui qu’ils cherchaient de tout leur cœur que les questions fusèrent de leur bouche.

— Quel est ce pays inconnu duquel on ne revient jamais et qui fait si peur aux adultes ? questionna la jeune princesse pleine de sagesse.

— C’est mon royaume, celui de la promesse dans lequel ni la mort, ni les larmes, ni la souffrance n’existent plus. Dans ce royaume rempli de paix, d’amour et de joie, il n’y a plus ni deuil, ni cri, ni douleur, car ces premières choses ont disparu.

— Mais lorsque les gens meurent, c’est dans ce pays qu’ils doivent aller, n’est-ce pas ? interrogea Maxence.

— C’est ça, mais ce pays n’est pas la fin. Il est au contraire le début d’une nouvelle existence et le passage vers l’amour ultime qui n’a jamais de fin.

— Est-ce vrai que les enfants ne devraient pas y aller tant qu’ils ne sont pas devenus grands et très âgés ?

— Ce royaume leur appartient ainsi qu’à ceux qui leur ressemblent.

— Mourir, c’est être séparé de ceux qu’on aime, murmure la demoiselle, des larmes dans ses yeux en songeant à tous ceux qu’elle a aimés et sont déjà partis.

 — La vie est brève ici-bas. À peine commencé, la voilà déjà qui s’achève, mais la vie dans le ciel est éternelle. La mort n’est pas un mur, c’est une porte qui s’ouvre vers un autre monde si on y croit très fort.

— Mais ne pouvez-vous pas empêcher que les gens meurent, ici, sur cette Terre ? ajouta Sinaï. Faire en sorte que la mort n’existe plus et que tout le monde soit éternel ?

— Oui, pourquoi souffrir ? dit Maxence. C’est tellement injuste. Pourquoi naître si on doit disparaître et laisser les gens malheureux ?

— Je suis la lumière qui guérit et qui console, mais parfois, la guérison est ailleurs, autrement. Aucun malheur ne survient sans que je ne le sache et tout a une signification, qu’un jour, vous connaîtrez. Aujourd’hui, vous ne connaissez qu’en partie, d’une manière obscure, comme au travers d’un miroir, mais quand le moment sera venu, alors vos yeux s’ouvriront et vous verrez, vos oreilles entendront parfaitement et nous marcherons côte à côte. Je vous ai préparé une demeure, et quand le jour sera venu, moi, le souffle de mon esprit, le Père et les anges, ainsi que tous ceux qui vous ont devancé dans cet au-delà, nous vous y accueillerons dans une grande fête, avec un grand festin.

Sinaï et Maxence avaient toujours imaginé ce pays de la mort comme un endroit terrible, mais voilà qu’ils le voyaient à présent comme un royaume enchanteur dans lequel, un jour, lorsque le temps serait venu, ils pourraient aimer à l’infini, jouer autant qu’ils le voudraient, chanter, apprendre et faire mille choses merveilleuses. Ils n’avaient plus peur désormais et se sentaient apaisés au-dedans d’eux.

— J’aimerais tant voir la couleur du ciel comme nous l’a si souvent décrit « mamynou », confia Sinaï. Elle nous parle d’un bleu turquoise, mais qu’est-ce donc que cette teinte ?

— Et la couleur des arbres, des prairies, du soleil ? demanda Maxence. À quoi ça peut bien ressembler ?

D’un mouvement de patte, le grand fauve expulsa l’obscurité et fit le jour. Le soleil réapparu, brillant à son zénith. D’abord aveuglés par cette lumière qui révélait tout ce qui se cachait dans le noir, super Max et la petite guerrière purent enfin voir clair. Ils étaient délivrés de cette malédiction des ténèbres et s’extasièrent face à la beauté du ciel, face à l’immensité de l’horizon, face à la nature verdoyante, abondante et frémissante. La flamme en eux brûlait comme un feu d’amour ardent et ils la sentaient sur leur peau comme une caresse incandescente.

Depuis ce jour, la flamme de l’amour s’était rallumée dans les cœurs de tous ceux qui l’avaient éteinte à force de trop de tristesse, de colère ou de manque de pardons, mais elle s’était aussi invitée dans le cœur de ceux qui la découvrait comme un trésor personnel. Depuis ce jour heureux de paix retrouvée et de grande bénédiction, Noël était une véritable fête, durant laquelle la lumière brillait haut dans un ciel bleu turquoise et illuminait le pays rebaptisé « le pays de l’espérance ». Cette lumière rappelait à chacun de prendre bien soin de son cœur, de veiller sur ses pensées, de garder les yeux fixés sur celui qui ouvre le chemin de la foi et nous promet que l’amour ne meurt jamais.

Désormais, l’étoile du matin éclairait cette terre jusqu’au soir venu. Et tous ceux qui la regardait se souvenaient que, même dans la nuit la plus noire, même aux heures les plus sombres et les plus froides, même si l’épreuve est là, comme un phare qui guide les bateaux perdus dans la tempête, cette lumière demeure et permet de ne pas couler dans les eaux tumultueuses et effrayantes, car tout à un sens, même si nous n’en comprenons pas la raison.

FIN

3 commentaires sur “Le pays où il faisait toujours sombre et froid

  1. J’ai écris ce conte en hommage à la foi d’une incroyable petite demoiselle qui s’appelait Sinaï, qui s’est battue comme une vraie guerrière avec une grande foi et qui a rejoint le Seigneur il y a 4 ans, mais aussi pour parler de Maxence ou superMax et de sa bravoure jusqu’au bout de ce combat contre la maladie. #sinai4ever

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  2. Bravo Christine. Quel beau conte pour petits et grands, si bien imagé, avec beaucoup de références à la Parole !
    C’est vraiment très riche et on peut y puiser des enseignements simples pour marcher dans la victoire quand le chemin est difficile. J’ai bien aimé les phrases répétées des enfants à chacune de leurs rencontres. Ça me rappelle la formulation des contes de ma jeunesse. Vraiment sympa !

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