Ah que je puisse profiter des bêtes sauvages préparées pour moi; et je prie qu’elles puissent être trouvées prêtes à se jeter sur moi, qu’elles mes dévorent rapidement et ne me traitent pas comme certains que, de peur, elles n’ont pas touché. Mais si elles ne souhaitent pas m’attaquer, je les obligerais à le faire.
Pardonnez moi: je sais ce qui est un bénéfice pour moi. Maintenant je commence à être un disciple. Et que personne, visible ou invisible, ne m’empêche d’atteindre Jésus Christ.
Qu’il y ait croix et feu! Qu’il y ait des hordes de bêtes sauvages! Qu’il y ait des déchirures, des brisements, des dislocations d’os! Qu’il y ait des coupures de membres! Qu’il y ait broyage de tout le corps; et que tous les affreux tourments du diable viennent sur moi!
Laissez moi seulement atteindre Christ. -Ignace d’Antioche, lettre aux Romains, chap V
Pour un compte-rendu succinct de qui était et comment est mort Ignace d’Antioche, disciple de l’apôtre Jean, et pasteur d’Antioche, voir le martyre d’Ignace
Nous étions en l’an 107, dans les cachots de Rome. Trajan dirigeait Rome, avec habileté et rigidité. Sous son règne, on ne recherchait pas les chrétiens, mais on ne les laissait pas non plus libre s’il y avait dénonciation. Ignace d’Antioche, un des successeur de Paul à la tête de l’église d’Antioche avait été dénoncé pile au moment où l’empereur était dans la ville. Le procès avait été rapide: Il était condamné aux lions de Rome. Nous étions au petit matin de l’exécution. Il faisait encore nuit noire, mais Ignace veillait dans sa cellule. Il avait décidé de commencer dès maintenant sa vie éternelle en ne dormant plus jamais de sa vie.
Il était assis sur la paille moisie de sa cellule. Relié à lui par des lourdes chaînes, deux légionnaires romains ronflaient. Et Ignace d’Antioche priait.
Seigneur, que mes enfants à Antioche ne choisissent pas cette brute de Sosthène pour me remplacer! Qu’ils soient gardés de toute division et qu’ils obéissent bien à leur évêque. Oui l’unité de l’Eglise Seigneur, garde notre unité! Et pour les Thralliens Seigneur, rends leur toutes leurs bénédictions. Tu vois que leurs dons ont été captés par les soldats romains sans qu’ils aient cessé de me frapper. Rends à ces soldats ce qu’ils méritent!
Il était à cheval entre le ciel et la terre, la tête au paradis, le corps sous la terre. Dans l’état où il avait été amené, il avait l’impression que Dieu lui accordait immédiatement tout ce qu’il demandait, qu’il avait par ses paroles toute la puissance du Saint Esprit et il se répandait généreusement en prières.
Et soutiens Polycarpe, mon compagnon d’études, Seigneur. Smyrne est remplie de faux enseignants, donne lui l’éloquence et la force spirituelle de les vaincre. Et puis soutiens l’empire. Trajan est ton ennemi, mais sans lui le monde s’effondrerait et l’évangile ne serait plus annoncé.
Et encore mille autres requêtes comme celles-ci. Quand il eut fini, il y avait un rayon de soleil sur le fond de la cellule.
Et je te remercie, je te loue et je te rends gloire pour l’extraordinaire destin que tu m’as accordé! Moi, le plus faible de tes fils, tu m’as accordé le même destin que mes maîtres les apôtres, que mon Seigneur le Christ. Je suis fier et honoré de mourir pour ton nom. Merci d’avoir fait de mon corps le pain du sacrifice, et que ce sacrifice soit de bonne odeur devant toi.
Ignace était au seuil du paradis. Il n’avait plus de doutes depuis que la sentence avait été rendue. Cela ne voulait pas dire qu’il en avait toujours été ainsi. Ignace d’Antioche était un disciple de l’apôtre Jean, en même temps que Polycarpe. Il avait été le premier ancien a succéder aux apôtres à Antioche, puis le premier évêque de la deuxième génération de chrétiens dans cette ville. Et tout le temps où il était en place, il s’était battu contre le doute et le sentiment d’être sans valeur.
Ignace n’était pas un prophète aux inspirations profondes, comme l’apôtre Jean. Il n’était pas un enseignant au sens pédagogique brillant, comme l’était Appolos. Il n’était pas un orateur éloquent qui transformait les cœurs, comme l’était Clément de Rome. Il n’était même pas un pasteur sensible et doux, comme l’était Polycarpe. Depuis qu’il était évêque, Ignace s’était senti écrasé par sa charge, pourvu d’un devoir pour lequel il n’était pas taillé, et avec une quantité de questionnements existentiels qui le confinait à la panique. Il n’avait aucune idée de quelle était sa véritable vocation dans le ministère. Mais Dieu visiblement avait une idée, puisqu’il était devenu évêque.
Ignace ne s’était pas arrêté à ses doutes: avec constance, fidélité et patience, il avait fait de son mieux pour encourager les prophètes de son assemblée. Il avait fait de son mieux pour enseigner les écritures. Il ne parlait pas bien, mais il parlait. Il n’était pas le pasteur le plus sensible et doux du troupeau, mais il était fidèle et constant. Il n’était qu’un chrétien médiocre, mais il n’avait pas renoncé à l’excellence. Désespéré de plaire à Dieu, il avait travaillé trois fois plus que les autres.
Puis Trajan était venu. Trajan avait condamné, et Ignace avait enfin compris son destin, sa place dans l’histoire du cosmos. Il n’était pas destiné à être prophète, ni enseignant ni orateur ni pasteur. Il était destiné à être témoin. Il était le bouc mis à part dans le troupeau pour être sacrifié sur l’autel, afin d’attirer sur l’empire la bénédiction pour le peuple. Submergé de gratitude devant la réponse à toutes ses questions, il considérait la mort comme rien, et la souffrance comme une bouffée d’air frais.
Lui, l’avorton de la fille à soldats, le grain de poussière d’Antioche, l’évêque sans talents particuliers. Il était choisi pour être grand témoin de l’Evangile, et montrer comment mourrait un disciple de Christ.
Voilà pourquoi il était heureux à cette heure.Voilà pourquoi il se sentait enfin disciple de Christ.
Puis l’heure vint. Les légionnaires se réveillèrent, le geôlier tira Ignace de sa cellule et le prépara, et il se retrouva dans l’arène. Le disciple de Christ goûta alors aux rayons bienfaisants du soleil, et fut saisi par la grâce qu’il avait demandé: celle d’être sacrifié. Les lions, énormes bêtes de l’Atlas qui faisaient cent kilos chacune, semblaient hésiter à se jeter sur Ignace dans un premier lieu: c’était déjà le cinquième jour des jeux, et elles avaient eu bien d’autres repas comme celui-là. Mais elles firent une exception pour Ignace.
Le lion rugit, puis se jeta sur le disciple de Christ.
Ignace hurla.
De joie et de triomphe.
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