Poésie

Agravain (par Prothello)

Une pluie battante. Les arbres bruissent.
Le vent siffle et son visage n’est plus si lisse.
Ses yeux éperdus manquent de malice,
Et par ses pas frénétiques, la boue se ratisse.
Les troncs semblent bouger, il se croit encerclé,
Agravain a laissé tomber sa superbe, il n’a pas la main
Plus de contrôle, rien pour le retenir, plus de lucidité.
Une première fois qu’il subit, réalise qu’il n’est qu’un point.

La respiration hachée, il se sait seul, se sent nu.
Il s’est pensé fort, courageux, prêt à braver les intempéries.
Agravain a d’abord jeté son bouclier inutile contre les crues.
Puis le long du chemin, fier, il a posé son casque salutaire, gris.
Maître de sa vie et de ses décisions, il n’a nul besoin de son épée.
Qui voudrait l’indisposer, lui, l’un de ces chevaliers renommés ?

L’eau poisseuse lui colle à la peau, dégouline sur son corps.
Il se déshabille, enlève ses bottes trouées, se déleste de sa ceinture,
Qu’il est léger ainsi, enfin libre, se-dit-il, de ses torts !
La bienséance d’Agravain s’effiloche, laisse place à sa nature.
Le vent fait danser ses boucles, il tourbillonne dans le dédale.
Agravain a l’impression que tout gravite autour, pour lui.
L’homme dans la clairière se voit parfait, vulnérable : pitoyable.

Il regarde les alentours et ses yeux s’engloutissent de noir,
A bout de force, au bout de sa hardiesse, il se laisse choir.
Une bataille fait rage dans sa tête, rend ses pensées un carnage.
Agravain ne sait plus, a tout perdu, ne se reconnaît plus,
Epuisé, une larme roule, il s’avoue enfin vaincu.
Il n’est pas le meilleur, ne le sera jamais même avec tout ce qu’il a fourni.
Alors, il s’autorise à fermer les yeux, et tendrement entend
Des pas, quelqu’un approche et d’un timbre sans âge
La main tendue dit : – Mon fils, relève toi, je t’aime tant.

Prothello

Ce poème a été écrit à l’occasion de notre concours de poésie, vous pouvez le retrouver dans notre eBook gratuit Lueurs dans la tempête.

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