ACTE II (2e partie)
Scène III
FARIKA
Par tous mes dieux ! Quel triste jour et quel ennui !
J’ai vécu près de lui un amour sans ombrage,
Nous avons eu l’espoir et la paix en partage
Mais je vois transformée la vie de mon Seigneur,
Mon époux Naaman, héros toujours vainqueur
S’égare loin de moi, le front triste et l’œil terne.
Quel triste sentiment aujourd’hui le gouverne ?
Depuis ce jour funeste où l’ignoble prélat,
Prophète de malheur, annonça son trépas,
Naaman est vaincu, sa force est terrassée,
Laissant à l’agonie son épouse harassée.
Scène IV
FARIKA – LÉA
LÉA
Le marché que voilà fut promptement conclu !
FARIKA (à part)
Voici venir Léa, fille du peuple élu.
(à Léa)
Tu portes sur tes lèvres une humeur satisfaite.
LÉA
Je reviens à l’instant d’une amusante fête.
Tes deux jeunes rivales, en un obscur cellier,
D’un même accord m’avaient menée pour me briser.
Sans efficacité leurs poings frappaient le vide ;
J’esquivais tous leurs coups, j’étais bien plus rapide.
Enfin, leur saisissant le buste entre mes mains,
Telles de sombres cloches ébréchées dans l’airain,
Je les fis percuter, accord sans harmonie ;
Sans élégance aucune, leur belle compagnie
Telle deux sacs de grain croula sur le pavé.
Maudite race juive s’est bien laissée trouver.
FARIKA
Léa, je te serai cent fois reconnaissante
De m’avoir corrigé ces pestes insolentes.
De ton joyeux combat me livrant le récit,
Tu as calmé mon cœur et l’as fort diverti,
Et de la pauvre épouse éclairé la tristesse.
LÉA
Pourtant votre visage exprime la détresse.
FARIKA
Ô Léa ! Qui pourra soulager mon émoi ?
LÉA
Maîtresse, j’aimerais, de votre désarroi
Porter quelque remède. Je comprends votre peine.
FARIKA
Naaman, notre maître, ô douleur souveraine,
Depuis que de Nazar l’oracle fut rendu,
Que les rumeurs de cour le déclarent perdu,
Naaman montre à tous une face chagrine,
Il tremble pour sa vie, redoute sa ruine,
Il ne me parle plus, me traite sans égard
Et ne m’accorde plus la grâce d’un regard.
Se peut-il que Rimmon, dieu si juste, si sage
Ait contre Naaman inspiré ce message ?
Qu’animé contre lui de tant d’aversion
Lui-même ait proclamé sa condamnation ?
Que pourrais-je à ce dieu aux humeurs si cruelles
Offrir pour qu’à l’instant son pardon se révèle ?
Est-il assez de larmes, est-il assez d’encens ?
Donnerai-je ma vie ? Verserai-je mon sang ?
LÉA
Oui, j’ai compassion de votre âme éplorée.
Que j’ai peine à vous voir ainsi désemparée !
Ô ma douce maîtresse, essuyez donc vos yeux,
Retrouvez, Farika, votre visage heureux.
Je suis de votre peine assurément coupable,
En défiant Rimmon, – était-ce raisonnable ? –
J’ai attiré sur lui du prêtre la fureur.
De l’image taillée n’ayez aucune peur.
Jamais pierre ni bois ne pourront vous détruire.
L’idole sur la terre n’a de force ou d’empire.
Craignez plutôt le Dieu qui le monde a fondé,
Et qui l’armée des astres au ciel a présidé.
Qu’importent de Rimmon la haine et la colère.
Craignez le Créateur, ayez soin de lui plaire.
Lui seul est tout puissant ; Quel mal pourrait Rimmon ?
Oui, Nazar a maudit, la haine sur le front,
Mais quel est le pouvoir de Rimmon sur la vie ?
La pierre ne peut pas donner la maladie.
Ne craignez point, Madame, ayez en l’Éternel
Confiance infinie, c’est un Dieu paternel,
Sa puissance se joue de toute la matière,
Il se rit de l’idole, se moque de la pierre.
Ne prêtez nulle foi aux rumeurs de la cour :
Je crois au Dieu vivant, je crois au Dieu d’amour,
Aujourd’hui, Naaman, rongé d’inquiétude,
Demain témoignera devant la multitude
Qu’aucune maladie n’a ravagé son corps,
Confondant à jamais ce vieux prêtre retors.
FARIKA
Ô gentille Léa, servante précieuse !
Douce consolatrice, aimable et gracieuse !
Tu m’as fait retrouver le sourire et l’espoir.
Tu m’as ouvert les yeux, je courais dans le noir.
Ce sont des mots en l’air, menaces infondées,
Ridicules terreurs, angoisses insensées.
Allons d’un pas zélé consoler Naaman.
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